La journée où je découvris Canton et sa pauvreté (2/12)

A la sortie de la gare de Canton se dresse fièrement une grande place, qui, à cette heure matinale était emplie de gens divers. Certains couraient, j'imagine qu'ils avaient peur de rater leur train ou peut-être avaient-ils hâte de revoir leur bien-aimé, d'autres tentaient vainement de vendre des billets en hurlant, certains avaient dormi là, et, les yeux encore humides, aveuglés par le soleil levant de ce mois d'avril, s'éveillaient. Quant à moi, je sortais de la gare, avec mes lourdes valises.

Je me disais que ce spetacle était familier, qu'il ne changeait pas beaucoup de la France. Cependant, c'était avant que je vois tous ces messages de propagande qui s'affichaient sans complexe. Sur les bâtiments avoinisants, on les voit s'épanouir un peu partout. Même sur la gare, on observe des panneaux gigantesques. On peut les repérer assez facilement : Ils sont écrits en lettres jaunes sur fond rouge. La Chine n'est après tout pas si similaire à la France... D'ailleurs, c'est dans cette ville que je me rendis compte que la Chine était une exposition permanente de propagande communiste et nationaliste. 

Pourquoi suis-je passé à Canton ? En fait, il s'agit du moyen le moins couteux et le plus pratique pour aller en Yunnan (qui, je le rappelle est l'objectif de ce voyage). Evidemment, j'en ai profité pour visiter un peu. 

Les messages des pouvoirs publics sont écrits en jaune sur fond rouge en Chine, et sont essentiellement des messages de propagande 

Lors de notre expédition dans Canton, on put voir des parcs, des marchés, et des zones résidentielles. Les infrastructures sont délabrés et une impression de pauvreté latente règne, que ce soit à cause des bâtiments inesthétiques, des routes poussiéreuses, de l’air pollué ou des gens affichant un air fatigué voire léthargique. D’ailleurs, j’ai eu l’impression que les gens se mouvaient au ralenti, beaucoup dormaient en plein jour dans leur magasin. Nous sommes donc loin de l’hyperactivité Hongkongaise à laquelle j’étais tant habitué. Les Cantonais étaient, en outre, particulièrement petits. Ceci est explicable, d’une part, pour des raisons génétiques (liées à la selection sexuelle néoténique des asiatiques), et d’autre part, par leur alimentation. Le manque de viande  et la malnutrition empêchant les enfants d’atteindre leur taille normale donnant des adultes de taille plus réduite que leur potentiel.

D’ailleurs, j’ai pu noter qu’en Chine, l’origine sociale est visible de façon beaucoup plus simple que dans les pays développés : la stature en est un élément principal, la couleur de peau en est un autre. D’abord, la taille est un critère de mesure socio-économique majeur dans les pays pauvres ; de nombreuses études ont montré que la croissance des individus est fortement réduite par une alimentation instable, déséquilibrée ou insuffisante. Ainsi, une grande stature a été associé un statut social élevé car elle est souvent synonyme d’une bonne alimentation pendant l’enfance. En ce qui concerne la couleur de peau, une peau bronzée est associée aux travaux manuels extérieurs alors qu’une peau blanche est liée aux travaux intellectuels d’intérieur voire à l’oisiveté du rentier, symbole ultime de la richesse. Ainsi, une haute stature et une couleur de peau claire sont fortement positivement associés en Chine, et synonymes de beauté. La beauté n’est ainsi pas objective, mais subjective et construite : ce qui est beau est ce qui est associé à la richesse et aux classes sociales supérieures. Par comparaison, aujourd’hui, en Europe, le léger bronzage est synonyme de beauté car c’est associé aux gens qui ont les moyens de partir en vacances ou de se payer des UVs. Bref, trêve d’anthropologie et continuons notre histoire.

Un chinois qui se repose devant sa boutique

C’est dans un marché de Canton que j’achète une montre à 20 yuans qui me servira pendant tout le voyage. Par contre, elle ne durera qu’un mois avant de décéder... Du typique made in China, donc. Ensuite, les toilettes à Canton sont vraiment horribles, il n’y a pas de cabines individuelles et seulement des salles communes (je vous laisse imaginer les conséquences). Enfin, le cosmopolitisme de la ville de Canton est notable, car il s’agit à ma connaissance d’un des rares endroits de Chine où on peut voir une communauté noire très présente.

A un moment, une jeune fille Chinoise vient nous voir et nous parle, curieuse de parler à des étrangers. Nous parlons un peu, elle apprend l’anglais à Canton. Elle nous montre où est le métro, puis nous nous séparons.

Dans le métro, les tickets européens sont remplacés par des jetons de fêtes foraines. Après quelques stations, on arriva dans un parc mais il fit nuit assez rapidement et notre visite fut donc écourtée. Nous nous perdons rapidement et nous fumes obligé de prendre un taxi pour nous ramener à la gare. Heureusement, les prix des taxis en Chine sont vraiment ridiculement faibles.

Demeures Cantonaises (qui sont davantage des cages à lapins que des appartements...)

A notre retour à la gare, un camion de pompier lave les rues devant la gare (oui, un camion de pompier). La scène était très cocace : le camion allait si vite que les gens étaient obligés de courir pour éviter des jets d’eaux sortant des tuyaux à haute pression utilisés pour laver le sol. Un pauvre Homme ne vit pas le camion et ses valises et lui furent trempés. Après que le camion eut mouillé la grande place, une armée d’employés équipés de balais essuyèrent le sol en courant en rythme parfait. Un spectacle surréaliste !

Nous devons maintenant prendre le train qui nous emmènera en Yunnan. Le trajet durera 25 heures donc nous faisons des stocks de nourriture et de boissons puis nous partons….